Les résultats provisoires de l’élection présidentielle ivoirienne du 25 octobre 2025 confirment sans surprise la victoire éclatante d’Alassane Ouattara, président sortant âgé de 83 ans, qui s’achemine vers un quatrième mandat consécutif. Selon la Commission électorale indépendante (CEI), Ouattara obtient plus de 90% des suffrages dans plusieurs régions, notamment le nord du pays, la diaspora et certains bastions historiques. Ses adversaires, issus d’une opposition morcelée et pour partie écartée du scrutin, ne franchissent que rarement la barre des 10%, malgré une faible participation électorale estimée au maximum à 30%.
Ce résultat, salué pour la stabilité institutionnelle qu’il conforte, interroge néanmoins sur la vitalité démocratique du pays. Les leaders alternatifs comme Laurent Gbagbo et Guillaume Soro ayant été disqualifiés, la compétition présidentielle s’est jouée dans un climat « sous contrôle », jugé inéquitable par plusieurs observateurs internationaux. Les voix dissidentes pointent une évolution vers une démocratie verrouillée, où les institutions semblent alignées sur le pouvoir exécutif du RHDP. Dans une interview avec Alain Foka, l’ex-Président Laurent Gbagbo avait qualifié ces élections de « braquage électoral » et même de « coup d’état civil ».
Sur le plan économique, Ouattara capitalise sur un solide bilan de croissance (environ 6% ces dernières années), de grands projets et une maîtrise de l’inflation. Pourtant, derrière cette façade de réussite, des économistes ivoiriens alertent : la continuité du pouvoir peut freiner les réformes, nourrir un sentiment d’exclusion dans le sud et l’ouest, et raviver la défiance vis-à-vis du partage équitable des richesses nationales. Le risque d’un ralentissement des investissements et d’une stagnation institutionnelle est réel, à mesure que la perspective d’alternance politique s’éloigne.
À l’échelle régionale, la Côte d’Ivoire se démarque aujourd’hui comme bastion de stabilité face aux soubresauts du Sahel. Malgré les critiques, Ouattara demeure un acteur incontournable dans la coopération contre le terrorisme. Mais la question de la succession, tant générationnelle que politique, reste en suspens : comment organiser l’après-ADO sans fragiliser le fragile équilibre national ?
Alors que les élections législatives se profilent pour le 27 décembre 2025, l’avenir du pays semble se résumer à ce dilemme : prospérité et stabilité économique au prix d’un pluralisme démocratique affaibli, où la promesse d’alternance reste repoussée à plus tard. Un cinquième mandat est exclu constitutionnellement, mais les incertitudes sur la relève nourrissent la crainte d’un brusque vide institutionnel à terme.
Côte d’Ivoire 2025 : un pays stable, mais à l’épreuve de ses propres paradoxes démocratiques.
