Le taux de chômage en Côte d’Ivoire : état des lieux, causes et perspectives du marché du travail à Abidjan
Le taux de chômage en Côte d’Ivoire reste un indicateur central pour appréhender les dynamiques socio-économiques du pays. Malgré une croissance robuste ces dernières années, le marché du travail est toujours affecté par des déséquilibres profonds, particulièrement à Abidjan, épicentre économique du pays. Voici une analyse étayée du chômage, surtout chez les jeunes, et des pistes à envisager pour l’avenir.
État actuel du taux de chômage
Selon les données de YCharts (via la Banque mondiale), le taux de chômage en Côte d’Ivoire est estimé à 2,29 % en 2024, une légère hausse par rapport à 2,27 % en 2023 (YCharts). Ce taux faible contraste avec d’autres pays de la région, mais mérite d’être mis en perspective.
Le taux de chômage des jeunes (15–24 ans), selon la Banque mondiale, est monté à 3,98 % en 2023, contre 4,01 % l’année précédente (TheGlobalEconomy.com, FRED). Ce niveau reste faible comparé à la moyenne mondiale (~16 %), mais masque des réalités inquiétantes.
Le poids de l’emploi informel
Le taux officiel de chômage ne reflète pas les nombreux emplois précaires ou sous-employés. Le secteur informel constitue une composante majeure du marché du travail :
- En 2024, environ 65,3 % des travailleurs étaient employés dans l’informel, bien que ce chiffre soit en légère régression par rapport à 2020 (66 %) (ISS African Futures).
- L’économie informelle représenterait près de 38,3 % du PIB en 2023 (ISS African Futures).
- On estime à 7 millions le nombre de personnes employées dans ce secteur urbain, majoritairement par des femmes (World Bank Blogs).
Le chômage chez les jeunes : un défi majeur
Le taux de chômage chez les 15–24 ans reste modéré (3,98 %) mais dissimule une précarité forte. Par ailleurs, plus de 30 % des jeunes de moins de 35 ans seraient sans emploi ou sous-employés selon certains rapports gouvernementaux récents (Congo Times). Le programme d’insertion jeunesse 2023–2025 vise la création de 102 000 opportunités (stages et formations), dans le cadre du Programme Jeunesse de la Gouv, mais l’ampleur du phénomène reste préoccupante (Congo Times).
Les causes structurelles du chômage
- Mauvaise adéquation formation-emploi : l’offre éducative peine à répondre aux besoins du marché.
- Croissance démographique rapide : la population active croît plus vite que la création d’emplois formels.
- Prédominance du secteur informel : majorité des emplois sont non déclarés et peu protecteurs.
- Segmentation du marché du travail : selon la Banque mondiale, en 2025, l’agriculture ne représenterait que 30 % de l’emploi, contre 64 % en 2002, et les emplois non agricoles continuent de croître mais restent majoritairement informels (Brookings).
- Faible industrialisation et bureaucratie dissuadante pour les PME.
Spécificité du marché du travail à Abidjan
À Abidjan, environ 40 % des emplois formels du pays sont concentrés dans la capitale. Si des secteurs comme la finance, les télécoms ou le commerce offrent des opportunités, l’accès reste très concurrentiel. Beaucoup de jeunes diplômés se tournent vers des activités informelles telles que le transport artisanal, la vente de proximité ou des métiers artisanaux peu rémunérateurs.
Perspectives et recommandations
Pour répondre au défi du chômage, plusieurs leviers pourraient être activés :
- Réformer l’éducation pour aligner les formations avec les besoins économiques réels.
- Favoriser l’entrepreneuriat grâce à des incitations fiscales, des microcrédits accessibles et un accompagnement technique.
- Formaliser le secteur informel, en appui sur des dispositifs comme les modules de formalisation de l’OIT (International Labour Organization).
- Améliorer la productivité des micro-entreprises pour générer des revenus durables et encourager la sécurisation des emplois (Brookings).
- Décentraliser les initiatives économiques, afin d’alléger la pression sur Abidjan et créer de l’emploi dans les villes secondaires.
Le taux de chômage en Côte d’Ivoire, bien que relativement faible selon les indicateurs officiels, cache une réalité marquée par le sous-emploi, la précarité et l’exclusion des jeunes. À Abidjan, le marché du travail est à la fois une source d’opportunités et un miroir des inégalités sociales. Pour relever ce défi, il est urgent d’adopter une approche intégrée, alliant réforme éducative, soutien à l’entrepreneuriat et modernisation des politiques publiques de l’emploi.
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